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Une Lettre


De l'abbé Bellière à Thérèse de Lisieux

« Ma bien chère Soeur en N.S.

La bonté dont Dieu use envers moi est bien touchante et celle qu'Il vous a communiquée opère profondément en mon âme toute réconfortée par les attentions que votre charité vous inspire - Je me sens devenir meilleur chaque fois qu'il m'arrive un peu de la piété dont on vit au Carmel - et je voudrais aimer Jésus comme vous l'aimez là-bas [...]

Vous l'aviez en votre coeur, quand vous composiez, ma Soeur, ce cantique d'amour que vous avez daigné m'envoyer. On y respire un souffle divin qui rend pur et fort. [...]

Je voudrais pouvoir chanter comme vous, ma chère soeur, pour dire à Jésus les sentiments que les vôtres m'inspirent - Mais Lui tout bon daigne agréer seulement ma prose rude et courte. Son Coeur si tendre ne fait pas trop attention à la forme et sa Grâce descend toujours.

Oh ! oui, ma soeur, « Vivons d'amour ». C'est le moyen de trouver du bonheur sur la terre - Sans Dieu, sans son Amour - qu'il fait froid autour de nous - Mais dès qu'une sainte ferveur anime nos coeurs, quelle sérénité et douceur de la vie - C'est bien en effet le repos sur les flots orageux, c'est vivre de la vie du Roi Glorieux, Délices des Elus - commencer sur terre le bonheur du Ciel [...]

et la peine n'est plus - car, ainsi que parle le Saint : quand on aime, il n'y a plus de peine, ou s'il y a de la peine, c'est une peine qu'on aime.

Je demande au Sacré-Cœur qu'il nous donne cet amour toujours plus grand, toujours plus fort et généreux et que par lui, Il nous attire tellement vers Lui que nous Lui demeurions définitivement et indissolublement attachés.

Vous savez donc, ma soeur, que je dois différer mon départ [...] - oui, mes supérieurs ont jugé mieux d'attendre ; Mon Directeur d'ici m'autorisait à partir - ceux de là-bas préfèrent que j'attende - Mais, l'an prochain ! [...] En avant, Dieu et Labeur.

A Dieu ma bien chère Soeur, priez toujours pour ma conversion - que le Maître fasse en moi quelque progrès - Je le prie souvent et bien fort pour vous.

A jamais dans son Saint Coeur, votre misérable frère M. Barthélemy-Bellière

Je vous recommande particulièrement des examens qui commenceront demain Lundi pour finir le 14. »

Première lettre de l'abbé Bellière à Thérèse, le 31 janvier 1897.

L'un des deux jeunes abbés avec lesquels elle eut une correspondance.
Il a alors 23 ans, un an de moins qu'elle.